Le vortex ring state peut faire chuter un hélicoptère. Voici ses causes concrètes, ses effets mécaniques et les actions pratiques pour s’en sortir.
Le vortex ring state (VRS) est un phénomène aérodynamique connu des pilotes d’hélicoptère. Il peut entraîner une perte rapide de portance et provoquer un taux de descente non contrôlé. Ce phénomène, aussi appelé « settling with power », est redouté en vol d’hélicoptère, car il peut survenir même lorsque le moteur fonctionne normalement. Les conditions de survenue sont spécifiques, mais les conséquences peuvent être graves si le pilote n’identifie pas le problème à temps. Comprendre les mécanismes précis du vortex ring state, ses effets sur la cellule et les solutions pour en sortir rapidement est essentiel pour tout opérateur ou instructeur. Cet article technique analyse les paramètres aérodynamiques en jeu, illustre les effets concrets sur la trajectoire et présente les actions correctes à mettre en œuvre. Il s’adresse aux professionnels du secteur aéronautique pour apporter une lecture claire, structurée et rigoureuse du sujet.

Le vortex ring state : un phénomène aérodynamique précis
Le vortex ring state se produit lorsqu’un hélicoptère descend verticalement ou presque verticalement avec un faible déplacement horizontal, tout en maintenant un certain niveau de puissance rotorique. Dans ce cas, les pales du rotor principal ré-ingèrent leur propre flux d’air, ce qui génère des tourbillons annulant partiellement la portance. Le flux d’air s’organise alors en anneaux tourbillonnaires autour du disque rotorique.
Ce phénomène survient typiquement lorsque :
- le taux de descente dépasse 300 m/min (environ 5 m/s),
- la vitesse horizontale est faible (inférieure à 30 km/h),
- le moteur reste en fonctionnement avec un couple élevé.
Le rotor aspire alors de l’air descendant mêlé à des flux tourbillonnaires instables. La pale d’attaque, en particulier sur le bord extérieur du disque, perd de l’efficacité. Le taux de descente augmente, et le couple moteur ne suffit plus à rétablir une sustentation normale.
Dans une configuration typique à 5 m/s de descente avec 75 % de couple moteur, le régime de VRS s’installe progressivement, et le pilote peut percevoir un léger buffeting, suivi d’une perte d’efficacité du manche collectif.
Certains hélicoptères comme le Bell 206 ou le UH-60 Black Hawk y sont plus sensibles, en raison de leur configuration rotorique. Le diamètre du rotor, la masse de l’appareil, et le taux de charge alaire influencent aussi le seuil d’entrée dans le vortex ring state.
Des essais menés par la FAA ont montré que sur un hélicoptère léger, un taux de descente de 4,6 m/s avec une vitesse sol de 10 km/h suffit à produire un VRS partiel. Sur des appareils plus lourds, ce seuil peut varier en fonction des conditions atmosphériques, notamment la densité de l’air et le gradient de température.
Les effets mécaniques et dynamiques du vortex ring state
Une fois le vortex ring state engagé, le flux d’air à travers le rotor devient instable. Trois zones distinctes se forment :
- Centre du disque rotorique : flux descendant partiel.
- Anneau intermédiaire : flux tourbillonnaire annulaire.
- Zone externe : flux ascendant inversé sur certaines sections.
Ce schéma perturbe totalement la portance normale. La résultante aérodynamique bascule, et les efforts mécaniques se redistribuent de façon inégale sur les pales.
Le taux de descente peut alors atteindre 7 à 10 m/s, soit 420 à 600 m/min, sans effet correctif du collectif. La stabilité longitudinale est dégradée, avec apparition d’oscillations parasites sur l’axe de tangage. Les vibrations augmentent, en particulier si le rotor est bimoteur avec couplage asynchrone.
Les capteurs d’angle d’attaque du rotor ne détectent pas directement le VRS. Les indications doivent venir du taux de descente (vario), du couple moteur élevé sans effet sur l’altitude, et du ressenti au manche.
Sur les hélicoptères civils comme le H125 ou le H135, la perte d’altitude peut atteindre 50 m en moins de 8 secondes, si aucune correction n’est apportée. Sur des appareils militaires comme le CH-47 Chinook, des simulations ont montré une perte de 100 m en moins de 12 secondes dans un VRS profond.
L’enveloppe de vol VRS peut être visualisée sur les courbes taux de descente / vitesse sol fournies par les constructeurs. Ces zones sont identifiées pour interdire les descentes verticales lentes avec puissance appliquée.

Les procédures concrètes pour sortir d’un vortex ring state
L’échappement d’un vortex ring state repose sur des actions spécifiques, connues des pilotes mais souvent mal appliquées en conditions dégradées.
1. Réduction du collectif
La première action consiste à réduire fortement le pas collectif. Cela permet au flux d’air de se réorganiser. La portance chute momentanément, mais le flux traverse le rotor sans recirculation.
2. Transition en translation avant
Le passage à une vitesse horizontale supérieure à 30–40 km/h est crucial. Il faut appliquer un cyclique avant modéré pour accélérer l’hélicoptère et sortir du cône tourbillonnaire.
Un exemple chiffré : un H125, en VRS à 6 m/s de descente, peut sortir du phénomène en 4 à 6 secondes si la vitesse avant atteint 50 km/h et le collectif est réduit de 25 %.
3. Autorotation partielle si nécessaire
Si l’altitude le permet, engager une autorotation permet de rétablir un écoulement laminaire par dessous le rotor. Cette manœuvre reste délicate sur des appareils lourds ou à faible hauteur.
4. Procédures spécifiques par type d’appareil
Certains hélicoptères disposent d’alertes VRS dans leur FMS (Flight Management System). Sur le S-92 de Sikorsky, des recommandations automatiques s’affichent au-delà de 3,5 m/s de descente à faible vitesse sol. Sur le H145, le FLI (First Limit Indicator) donne des seuils critiques à surveiller.
Les simulateurs permettent un entraînement précis. Une étude de l’EASA a démontré que la répétition d’au moins 6 exercices de sortie de VRS réduit de 40 % les temps de réaction en vol réel.
Il est important de maintenir une lecture constante du taux de descente et de croiser les données airspeed, couple, et comportement rotorique. Les techniques varient selon la masse, l’altitude densité et la configuration de mission (charge externe, vol montagne, vol stationnaire long).
HELICOLAND est le spécialiste de l’hélicoptère.